Lettres de condoléances

Condoléances de la Comtesse de Custing

Condoléances de la Comtesse de Custing - Page 1

Condoléances de la Comtesse de Custing - Page 2

 
23/7/18

Verneuil-sur-Avre (Eure)

J’apprends à l’instant, Monsieur Maxime, l’affreux malheur qui vous frappe. Je connaissais Sylvain depuis de longues années, j’avais pu apprécier ses qualités, j’avais pour lui une grande estime pour ses belles vertus de courage, de loyauté, de franchise. C’est une perte pour toute une famille quand un tel être disparaît, mais cela en est une pour la France aussi, dont les nobles enfants comme votre frère sont si utiles à notre cher pays.
 
Je pleure avec vous cet être d’élite que je ne dois plus revoir. On me dit aussi que vous avez un autre frère prisonnier ? Vous êtes, en vérité, trop affligé aussi je vous dis mes plus douloureux compliments de condoléances en lesquels je vous prie de croire, car ils sont sincères.

Ctesse de Custing

 

Condoléances de F.E Waegeli

Lettre de F.E Waegeli - Page 1

Lettre de F.E Waegeli - Page 2

 
Monsieur M. Berrut
Hôtel Bedford, Paris

Paris, le 15 juillet 1918
23 rue Pauquet

Bien cher ami,
Hélas puisque vous-même vous venez de me le confirmer, je n’ose plus en douter. Ce cher ami Sylvain est mort. Quand dimanche soir je l’ai appris, je ne voulais pas y croire et j’espérais encore. Maintenant le doute n’est plus permis, vous m’avez appris la brutale réalité aujourd’hui. Cher ami, je ne peux m’empêcher de pleurer. Si vous saviez combien j’aimais et appréciais votre cher frère Sylvain. Pensez ! Il y a quinze ans que j’ai eu le bonheur de faire sa connaissance, c’était à une assemblée de l’Union Helvetia, et je m’en rappelle comme si c’était hier. Dès lors, à chaque assemblée, nous étions assis tant qu’il en a fait partie, l’un à côté de l’autre, nous avons fait partie de plusieurs comités ensemble.
 
Que de bons conseils ne ma-t-il donnés ! Combien de soirs agréables n’ai-je passés à l’hôtel Bedford en sa compagnie. Oui, c’était un cœur d’or, désintéressé, d’un dévouement, cherchant toujours le bien-être de son prochain. Ah quelle affreuse chose, et quelle perte pour tous, car il ne comptait que des amis et admirateurs. Je ne peux en ce moment bien m’exprimer, car je souffre. J’ai écrit une nécrologie en son souvenir qui paraîtra dans l’Union Helvetia.
 

Lettre de F.E Waegeli - Page 3

 
Il méritait que l’on écrive des pages, sur sa bonté, son activité, son intelligence, sa clairvoyance, etc. Que faire cher ami, je vous envoie mes sincères condoléances et permettez-moi, tout en conservant mon inoubliable amitié à notre cher Sylvain, de la reporter sur vous et si cela est possible fortifier notre amitié mutuelle.
Bien à vous,
Je pleure avec vous et les vôtres

F. E Waegeli

 

Extrait du journal « Le Messager », juillet 1918

Extrait du journal "Le Messager", juillet 1918

LE MESSAGER – Juillet 1918
 
PUBLIER
Une belle et héroïque famille. – Un nouveau nom vient de s’ajouter à la longue liste des Savoyards tués à l’ennemi, celui de Sylvain Berrut, soldat à l’Etat-Major du 1er corps d’armée, décoré de la médaille militaire et de la croix de guerre, tombé le 8 juillet à …; il était âgé de 41 ans.
C’est pour LE MESSAGER une douloureuse occasion de signaler au respect de tous une belle famille de chez nous. Le père Berrut, de mœurs patriarcales, a eu 15 enfants vivants et bien portants. Originaire du canton voisin du Valais, il vint, encore jeune, s’établir à Publier, son pays d’adoption. Il ne tarde pas à y acquérir une petite propriété et une solide réputation de brave homme; la plupart de ses enfants y sont nés et il y est mort en janvier 1916.
Quand la guerre éclata, il vit partir cinq de ses fils aux armées : Ernest, Adolphe, Sylvain, Edmond et Joseph peu après, son cadet, Martial, était appelé à son tour. Il y avait, en outre, son gendre, Bussière, auquel devait s’ajouter un second gendre, Covette en tout huit hommes à la guerre.
Au début, tous sont simples soldats. Joseph, fatigué, est renvoyé; plus tard, les deux aînés seront, grâce à leur âge, détachés à l’agriculture, Martial, le cadet, conquiert, au 27e chasseurs alpins, le grade de caporal. Il est d’abord blessé et décoré de la croix de guerre, puis finit par être fait prisonnier. Edmond, soldat au 230e d’infanterie, se fait remarquer par sa froide bravoure et sa ténacité. Il est plusieurs fois cité à l’ordre, décoré de la médaille militaire et fait enfin sous-lieutenant. Blessé pour la troisième fois, il est fait prisonnier le 27 mai dernier.
Restait Sylvain. Attaché au général commandant le 1er corps d’armée, on le croyait relativement en sécurité. Son dévouement, cependant, lui avait déjà mérité la croix de guerre; il devait le conduire encore à la médaille militaire et … à la mort.
Le 3 juillet, chargé d’une mission de confiance à titre volontaire, il est frappé d’un éclat d’obus. Il a l’énergie, ayant perdu du même coup les camarades qui l’accompagnaient, de parcourir seul quatre kilomètres pour rentrer. Malgré tous les soins qui lui sont prodigués, il succombe à l’ambulance 5 jours après, laissant une veuve et deux enfants. C’est une perte immense pour toute sa famille.
Parti de Publier à 20 ans, sans un sou, Sylvain Berrut débuta à Paris comme simple chasseur, à l’hôtel Bedford, dont il devait bientôt devenir le propriétaire. Il disparaît à la fleur de l’âge, au moment où ses qualités remarquables allaient être appelées à s’exercer avec plus de chance de succès que jamais.
Bon pour les siens, Sylvain Berrut était aussi très accueillant et très serviable pour tous ses compatriotes et tous les Savoyards qui sont passés à l’hôtel Bedford garderont le souvenir de l’hospitalité affectueuse qu’ils y ont reçue, soit de Sylvain, soit de son frère Maxime.
Nous sommes certains d’être leur interprète et celui de tous ceux qui l’ont connu en présentant à sa famille nos plus sincères condoléances.